Dimanche à Copenhague

Elizabeth May

Pénétrer dans le palais des congrès s’est avéré un véritable tour de force. Un cercle de policiers danois bloquait l’accès à quiconque n’avait pas un motif valable de pénétrer dans la zone de la conférence… sans compter que le palais des congrès est fermé aujourd’hui pour des ratissages de sécurité… en vue d’accueillir plus d’une centaine de dirigeants venus du monde entier. Des chiens renifleurs d’explosifs, des clôtures et des fils barbelés partout, et moi, j’essaie d’entrer à temps pour CTV et la période des questions. Ça y est, j’y suis!

J’attends avec impatience le discours du secrétaire des États-Unis à l’Énergie Stephen Chu. En attendant, je discute avec un représentant du gouvernement d’Écosse, pendant qu’un groupe de musiciens danois se met à jouer (Outlandish, c’est le nom du groupe). Le représentant écossais m’annonce que l’Écosse compte réduire ses émissions de gaz à effet de serre de 42 % en dessous des niveaux de 1990. Très impressionnant!

Stephen Chu est extrêmement intéressant. Prix Nobel de physique et secrétaire à l’Énergie du président Obama. Il a ouvert son discours sur une citation du président : « L’époque où les États-Unis se traînaient les pieds est maintenant révolue. »

Je me demande si c’est la première fois de l’histoire que deux lauréats du prix Nobel se retrouvent dans un même cabinet.

Chu a passé en revu les principaux programmes des États-Unis visant à maximiser le rendement énergétique -- dans les appareils électroménagers, les maisons et les gros édifices (pour économiser jusqu’à 75 % de l’énergie utilisée dans les bâtiments).  

Puis il a présenté le programme ambitieux des États-Unis dans le domaine de l’énergie renouvelable. Selon Chu, le coût élevé du silicium cristallin et de la technologie de photopiles en couches minces est sur le point de chuter considérablement. Il en coûtera bientôt moins d’un dollar pour produire un kilowatt. Il estime que nous assisterons bientôt au développement à grande échelle de ces technologies, sans subventions du gouvernement.  

Son passage sur le biocarburant portait essentiellement sur l’éthanol cellulosique. Malheureusement, Chu a un énorme parti pris pour le nucléaire et estime que le seul obstacle au développement de cette industrie est le risque de prolifération des armes nucléaires. Il a également parlé de capture et stockage de CO2… en admettant que ces technologies pourraient ne jamais s’avérer viable sur le plan commercial. Passant en revu toutes les nations qui réalisent des travaux dans ce domaine, il n’a jamais mentionné le Canada. Il a aussi parlé d’investissements dans de nouvelles technologies, comme les gigantesques piles liquides. Encore à l’étape de prototype, ce genre de pile fonctionne un peu comme une grande piscine. Le stockage de l’énergie produite par les sources d’énergie renouvelables, éolienne et solaire, est très important.

Il a beaucoup insisté sur la recherche à haut risque et à valeur élevée actuellement en cours aux États-Unis, comme celle entourant la pile liquide.

M. Chu a cédé sa place sur le podium à M. Rajendra Pachauri (Ph.D.), qui est le président du Groupe d'experts intergouvernemental sur l'évolution du climat. M. Pachauri a confirmé l’opinion que je m’étais formée à partir des meilleures données scientifiques disponibles à l’heure actuelle, en insistant sur l’importance de freiner immédiatement la hausse des émissions de gaz à effet de serre pour les réduire définitivement à compter de 2015, ou il sera trop tard. Il a lancé un appel à la mobilisation de toutes les citoyennes et de tous les citoyens du monde pour forcer les gouvernements à intervenir.  

Aucun de ces deux orateurs n’a parlé de ce qui devait se passer ici, à Copenhague.  

La meilleure bannière de la journée a été celle de Greenpeace -- une immense bannière installée en face du Bella Centre sur laquelle on pouvait lire : « Les politiciens parlent. Les leaders agissent.»