Blogue d'Élizabeth : Stratégie politique

Elizabeth May

Cette semaine, j'ai été attaquée verbalement dans les médias et partout au Canada à propos d’allégations que j’ai faites l’an dernier lors d’une entrevue avec Steve Paikin, dans laquelle j’aurais affirmé que les Canadiennes et les Canadiens étaient « stupides. » Je suis stupéfaite par le fait que cette histoire ait pris tant d'ampleur qu'il m’est impossible d’aborder les politiques du Parti Vert en entrevue avec un journaliste ou un animateur de télévision sans qu’on me mette sur la sellette au sujet des remarques que j’ai faites à l’émission « The Agenda » de la chaîne TVO. (Si vous avez manqué ce moment d'inattention monumental, vous pouvez le voir à l'émission « Question Period » avec Jane Taber.) Il s’agit malheureusement d'arguments irréfutables lorsqu’on entend l’enregistrement des propos que j’ai tenus ou qu’on en lit la transcription. Mes paroles ressemblaient à ceci : « Les autres partis croient que les Canadiennes et les Canadiens sont stupides, et qu’ils ne pensent pas… et je suis fondamentalement d’accord avec eux sur ce point de vue. » Pris hors contexte, ces propos semblent vraiment montrer que j’ai carrément manqué de respect envers les Canadiennes et les Canadiens. Je veux être vraiment claire ici : je n’ai jamais considéré et je ne considérerai jamais la population canadienne autrement que comme un peuple intelligent et sensé.

La première chose importante à noter est que la remarque commençant par « je suis fondamentalement d’accord… » a été faite en réponse à un commentaire émis par un autre participant dont les paroles ne sont pas audibles sur l’enregistrement. En regardant l’entrevue, il est clair que je me tourne et que je porte mon attention vers le participant qui a fait ce commentaire. Cette personne se trouve hors champ et n’est pas entendue sur l’enregistrement, mais ses propos ont bien sûr été perçus par les gens qui se trouvaient dans le studio. Je parlais très rapidement, comme j’ai l’habitude de le faire, et le micro a capté certaines parties de ma remarque qui étaient dites d’une voix plus forte que pour les autres. Je désire régler cette affaire une bonne fois pour toutes et ne plus avoir à parler de ces moments d'inattention ridicules. J’ai revisionné cette entrevue sur la chaîne TVO avec Steve Paikin récemment, et il m’a confirmé que personne dans le studio n’avait pensé que j’avais dit que les Caadiennes et les Canadiens étaient « stupides. » En fait, mon commentaire en entier était pour exposer un point de vue opposé à celui-ci.

La raison la plus convaincante pour laquelle personne ne devrait croire que je pourrais considérer l’électorat comme « stupide » est le fait que mes ouvrages et mes écrits rédigés tout au long de ma vie et liés à la fonction publique et à l’activisme exposent des opinions qui montrent carrément le contraire. Depuis le début de mon implication dans le mouvement écologiste à l'époque de mon adolescence, à Cap-Breton, je travaille avec des organismes communautaires et des mouvements organisés de citoyennes et de citoyens dans le but de m’assurer que la démocratie est efficace et mise en valeur. La pierre angulaire de ma foi en la démocratie est ma ferme croyance en l’intelligence, en l’éthique de la responsabilité et en le sens de la justice dont les Canadiennes et les Canadiens font si souvent preuve. Peu importe les circonstances dans lesquelles s’est déroulée cette entrevue qui n’a eu lieu qu’une seule fois au cours d’un moment qui fait maintenant partie du passé, mon œuvre demeure un testament qui confirme le fait que je respecte et admire l’électorat canadien. J’ai confiance en eux pour donner les meilleurs résultats possible pour le Canada, malgré l’imperfection du système électoral majoritaire uninominal et les bouffonneries des politiciens accumulant les mises en scène et les mauvais agissements.

Les journalistes m’ont aussi demandé cette semaine quelle était la stratégie du Parti Vert pour la campagne électorale actuelle. Ce n’est ni l'humilité ni le souci de confidentialité qui me pousse à dire que nous n'en avons pas. En tant que parti, nous ne donnons pas souvent priorité aux stratégies électorales de nos candidats. À titre de chef du parti, j'ai comme engagement le plus profond de faire participer les Canadiennes et les Canadiens à la démocratie et d'informer le mieux possible les électeurs au sujet des choix qui s'offrent à eux. Le fait de participer aux débats peut amener un chef à se poser différentes questions. Sur quels points dois-je me concentrer? Quelle personne pourrais-je attaquer pour gagner le plus de votes possible? Quelle région du Canada serait la plus encline à me soutenir et comment puis-je faire pour la gagner à ma cause? Mais je n’aborde pas ces questions en pensant seulement aux avantages politiques des candidates et des candidats verts. Je les aborde d'abord et avant tout en tant que Canadienne qui désire voir des changements positifs aux prochaines élections. Je n’ai peut-être pas un énorme centre d’opérations, une campagne de publicités négatives, une équipe d’orientation stratégique « sans pitié » ni une banque de données sur l’électorat comme on en retrouve dans le fameux roman de George Orwell, mais j’ai foi en la force de discernement des Canadiennes et des Canadiens, ainsi qu’en leur refus constant des politiques de la peur.

Je prévois me concentrer sur les points qui, à mon avis, sont les plus urgents pour le débat dans le but d'obtenir des résultats à la fin de la campagne. Stephen Harper peut bien utiliser une logique et un sens de la stratégie tordus pour mener une campagne de grande envergure qui laissera les Canadiennes et les Canadiens stupéfaits s’il le désire, mais cela n’empêchera pas le Parti Vert de poursuivre sa campagne électorale menée par des idées et des solutions, ainsi que par des Canadiennes et des Canadiens qui veulent se présenter comme candidats parce qu’ils désirent faire connaître le message suivant : les électeurs canadiens peuvent choisir d'eux-mêmes la façon dont ils voteront. À cet effet, nous voulons nous assurer que toute la population possède l'information nécessaire pour exprimer son opinion. Nous lui faisons confiance pour faire un choix éclairé pour l'avenir.